Dans un monde où :
- les ressources sont de plus en plus rares et précieuses.
- la mondialisation s’accélère en laissant les plus démunis en demande.
- la révolution numérique et la règlementation deviennent difficilement incontournables.
Certains pays émergents ont fait naître l’esprit Jugaad : agile, simple, frugal, inclusif et décentré.
Ce concept s’appuie sur le recherche permanente de l’agilité et de la simplicité par la capacité d’adaptation et de flexibilité.
« Jugaad » est un mot hindi populaire que l’on peut traduire ainsi : « l’art de concevoir des solutions ingénieuses, largement pratiqué dans les pays émergents ».
C’est l’art de beaucoup plus avec beaucoup moins, l’art de l’ingéniosité au service des plus démunis.
Un état d’esprit et une éthique
Il associe :
- Simplification et recherche de sens,
- Empathie et passion,
- Créativité et coopération,
- Adaptabilité (innovation dans l’urgence) et improvisation (amélioration continue),
- Développement durable (recyclage, lutte contre le gaspillage) et responsabilisation (mise en action).
Il repose sur trois piliers :
- L’agilité: répondre aux contraintes immédiates,
- La frugalité : faire mieux avec moins,
- L’inclusion: répondre aux besoins des populations exclues ou fragiles.
Il s’appuie sur six fondamentaux :
- Rechercher des opportunités dans l’adversité: créer une logique de rupture. Faire de l’urgence un atout,
- Faire plus avec moins : c’est la définition même de l’économie frugale ou décroissante,
- Penser et agir de manière flexible : remettre constamment en question le système existant et s’adapter à chaque instant,
- Viser la simplicité et l’efficacité : rechercher une solution acceptable qui atteigne l’objectif, au lieu de se lancer dans une course aux technologies et aux fonctionnalités,
- Intégrer les exclus et ceux à la marge : pour cocréer de la valeur,
- Suivre son cœur : agir avec passion, pour créer du sens et de la valeur ajoutée.
Pour Navi Radjou, il convient de « passer d’un état d’esprit d’ingénieur à un état d’esprit ingénieux ».
Aller à l’essentiel
L’économie de moyens, l’agilité, l’adaptabilité doivent compenser la pénurie de ressources. C’est un principe d’allègement basé sur la simplicité.
L’idée première est d’utiliser « ce qui est à portée de main » et d’utiliser l’ingéniosité et la souplesse pour obtenir rapidement une solution :
- Simple,
- Économe.
Simple ne veut pas dire simpliste ni « low-cost ». J’en veux pour preuve l’invention du radiateur numérique.
L’objectif est de :
- Favoriser l’intuition,
- Déclencher une prise de conscience,
- Valoriser les ressources existantes,
- Porter un regard neuf ou un regard différent.
Outils : les méthodes agiles (scrum en particulier)
Allier performance et efficience
L’urgence doit faciliter la créativité, l’imaginatif et l’improvisation. L’exigence de résultats implique d’améliorer l’efficacité et la rapidité dans un temps restreint, tel un « Macgyver» à la sobriété heureuse (Pierre Rabhi).
L’urgence devient alors un atout et non un handicap :
- Mettre en valeur l’existant,
- Transformer le constat en objectif,
- Réduire la durée et la fréquence des travaux,
- Conserver une trace écrite afin d’améliorer le processus.
Outils : le brainstorming, la gestion de projet en mode coopératif, l’improvisation, la prise de notes partagée, le post-mortem
Placer l’humain au cœur de l’innovation
C’est, enfin une démarche, un état d’esprit humaniste.
L’exigence d’efficacité et d’efficience ne peuvent pas être dissociées d’un mieux-être au bénéfice de l’humain.
En évitant le gaspillage on se concentre sur l’essentiel. En facilitant la coopération et la co-création nous rendons l’homme libre et responsable.
Le principe de Jugaad est aussi d’intégrer les exclus. Des expériences récentes reprennent cette idée :
- La baguette en attente: le principe est simple : un client paie deux baguettes (ou plus) à son boulanger. L’une d’elle est mise en attente en attendant qu’une personne dans le besoin vienne la récupérer.
- Le livre en attente: A Rouen, la librairie « Le Rêve de l’Escalier » laisse la possibilité à ses clients d’offrir un ouvrage à un inconnu.
- Le café suspendu : ces initiatives trouvent leur origine en Italie. Un Napolitain solidaire ou heureux commandera un café et en payera deux, un pour lui et un autre pour un client démuni qui en fera la demande.
L’idée pourrait être développée dans les entreprises : des séances de coaching/formation/conférences pourraient être « offertes » à des opérationnels lorsque les managers n’auraient pas consommé la totalité de leurs crédits.
Faire d’une contrainte une opportunité
Le plat improvisé
Un dimanche soir, vous recevez des invités à l’improviste. Les commerces sont fermés, l’urgence et l’envie d’agir s’imposent à vous comme une évidence.
Qu’à cela ne tienne !
- Vous allez mobiliser les ressources disponibles (frigo, placards, imagination),
- Vous allez vérifier qu’elles sont utilisables (dates de péremption par exemple),
- Vous inventez une recette en utilisant les ingrédients à votre disposition,
- Vous maximiser les plats en minimisant les ressources (récupération de l’épluchage pour une soupe, des fanes pour un tempura par exemple),
- Vous créez un décor et une ambiance en gardant en tête l’idée d’improvisation et de partage.
L’idée est de prendre conscience de l’importance des ressources à votre disposition pour agir (imagination, improvisation, partage).
Dans le même ordre d’idée, pourquoi ne pas adapter vos courses en fonction des opportunités offertes (légumes moches, soldes, promotion, etc.) afin d’améliorer votre pouvoir d’achat.
Cette technique peut s’adapter à de nombreux domaines.
De nombreuses entreprises l’ont adopté : Renault, SNCF, BNP Paribas,…
A votre tour !
Que pouvez-vous entreprendre pour faire plus avec moins ?
Quelques exemples :
- Fabriquer un ordinateur à partir d’un bidon de vingt litres et de pièces récupération : Jerry Do-It-Together,
- Fabriquer un réfrigérateur ne consommant pas d’électricité : MittiCool
- Utiliser un seau pour récupérer l’eau froide du début de douche pour alimenter vos toilettes.